Occitanie - La gestion des eaux souterraines au sein du Parc naturel régional des grands Causses

Laurent DANNEVILLE et Christophe APOLIT, Parc naturel régional des grands Causses

Grâce à son réseau de mesures, le Parc améliore depuis une vingtaine d’années la connaissance de sa ressource en eau pour mieux la gérer, étudie le fonctionnement et la structure des aquifères karstiques présents sur son territoire et commence à surveiller l’impact du changement climatique sur les réserves karstiques.

 Station de mesures de Mayrinhac (Nord du Parc) © L. DANNEVILLE

Station de mesures de Mayrinhac (Nord du Parc) © L. DANNEVILLE

 

Le réseau de mesure du Parc

Une quarantaine de stations

Le Syndicat mixte du Parc gère une quarantaine de stations de mesures sur son territoire et en périphérie qui ont été mises en place au fur et à mesure des études hydrogéologiques menées sur les Grands Causses et dans le cadre de la création d’un réseau patrimonial défini à l’époque par le Ministère (cf. carte jointe du réseau). Ce réseau de mesures quantitatif permet l’acquisition en continu des données de débits. Il s’agit de mesures à la demi-heure avec plus de 20 ans de données sur certaines stations et des mesures régulièrement bancarisées (Banque HYDRO : http://www.hydro.eaufrance.fr/).

Carte du territoire du Parc avec implantations des stations de mesures © PNRGC

Carte du territoire du Parc avec implantations des stations de mesures © PNRGC

Des stations hydrométriques

Les stations de mesures sont en fait des stations hydrométriques (et non des piézomètres) installées en aval des principales exsurgences et résurgences karstiques du territoire (Cambrien, Lias et Dogger). Ces stations sont en général composées d’une échelle limnimétrique, d’un tube renfermant l’enregistreur des hauteurs, d’un seuil permettant d’obtenir une relation univoque entre les hauteurs mesurées et les débits, d’une échancrure permettant d’obtenir une meilleure sensibilité pour les bas débits (cf. photographie).

Station hydrométrique de la Dragonnière (Saint-Affrique) © L. DANNEVILLE

Station hydrométrique de la Dragonnière (Saint-Affrique) © L. DANNEVILLE

 
Autres mesures de débits effectuées

Pour connaître la ressource en eau souterraine et évaluer les réserves disponibles, il faut pouvoir effectuer des mesures de débits. Celles-ci s’effectuent à partir de différents moyens qui vont de simples mesures de vitesse grâce à des flotteurs naturels (feuille morte, coquille de noix...) à des mesures plus précises grâce à différents outils. En règle générale, la méthode la plus utilisée est le jaugeage au moulinet qui permet de mesurer l’ensemble du champ des vitesses d’un cours d’eau, formé par la source, grâce à une perche et un moulinet munis d’une hélice. Des bacs calibrés peuvent également être utilisés, ils permettent de connaître directement le débit avec la lecture d’une échelle intégrée. Enfin, pour des débits importants et pour de grands cours d’eau, on fait appel à la méthode de l’ADCP (Acoustic Doppler Current profiler) qui utilise une onde sonore pour mesurer la vitesse de l’eau à partir de la surface depuis un flotteur aménagé.

 Bac jaugeur  Canal venturi  Jaugeage au moulinet (saumon et hélice)  ADCP (acoustic Doppler current profiler)

Bac jaugeur

Canal venturi

Jaugeage au moulinet (saumon et hélice)

ADCP (acoustic Doppler current profiler)

L’hydrogramme

A partir des jaugeages, on transforme donc les hauteurs mesurées en débits, on obtient ainsi un hydrogramme. Celui de la source du Durzon par exemple (captée pour la SIAEP du Larzac) montre des variations annuelles et pluriannuelles, et permet de connaitre les débits de basses eaux, les débits de crue, les réserves souterraines disponibles à partir de l’analyse du tarissement de la source (cf. graphique suivant).

 

Evaluation de la ressource et autres utilisations du réseau quantitatif

Quantification de la ressource

Les mesures et analyses effectuées depuis une vingtaine d’année permettent d’évaluer la ressource karstique sur le territoire du Parc à environ 250 millions de m3. Ceci est comparable aux volumes des barrages à vocation hydroélectrique du Lévézou dont la capacité maximale est égale à 200 millions de m3.

Cette ressource principalement d’origine karstique est donc très vulnérable. Elle est utilisée pour l’Alimentation en Eau Potable de la plupart des collectivités, mais aussi pour l’irrigation, l’hydroélectricité et les piscicultures. Elles contribuent à l’alimentation des rivières (100 % en période estivale) et aux activités économiques et de loisirs.

Exsurgence de la Sorgues à Cornus © L. DANNEVILLE

Exsurgence de la Sorgues à Cornus © L. DANNEVILLE

Autres applications des réseaux

Le réseau mis en place permet également de suivre les débits d’étiage notamment pour les sources captées et de pouvoir extrapoler les courbes afin de connaître les débits futurs et donc de mieux gérer les services. Il est intégré au sein de la cellule de crise de la Préfecture de l’Aveyron afin de mieux suivre et gérer les étiages des cours d’eau. Il permet d’étudier l’évolution des réserves et les tendances sur le long terme par rapport au changement climatique, de calculer des bilans de matières (flux…) et d’établir des bilans de masses dans le cadre des traçages (avec production de la courbe de Distribution des Temps de Séjour), d’étudier le fonctionnement des aquifères (degré de karstification, phénomène d’intermittence….), de comprendre le comportement en crue des différents aquifères permettant d’adapter les PAPI (Programme d’Actions et de Prévention des Inondations) et enfin de constituer des modèles réservoirs dans le cadre de programmes de recherches.

 

Les perspectives avec la nouvelle Charte

Dans le cadre de la réalisation de la nouvelle Charte du Parc, document de référence pour les missions et objectifs à réaliser dans les quinze ans à venir (2022-2037), une orientation importante concerne la préservation et la gestion de la ressource en eau pour les humains, les activités et les milieux aquatiques. Une mesure spécifique est intitulée « Connaître, protéger, gérer la ressource en eau souterraine, sécuriser la ressource captée et optimiser les services de gestion ».

Dans ce cadre, plusieurs dispositions seront à mettre en œuvre, dont voici quelques-unes :

  • Sécuriser l’approvisionnement en eau pour les différents usages (eau potable, agricole, industriel) et mieux gérer les usages au niveau des bassins en tension. ;
  • Optimisation des services d’eau potable et réflexions sur un regroupement des compétences à une échelle plus large pour permettre des économies de mutualisation de moyens, de matériels, de connaissances ;
  • Établir une synthèse des ressources en eau disponibles sur le territoire pour les collectivités et partenaires ;
  • Pérenniser les suivis quantitatifs et qualitatifs sur les ressources en eau souterraine ;
  • Organiser une synergie avec les partenaires pour terminer la protection réglementaire des ressources captées pour l’alimentation en eau potable ;
  • Organiser et appuyer une meilleure gestion du petit cycle de l’eau et travailler sur la qualité des réseaux ;
  • Sensibiliser l’ensemble des acteurs sur la protection de la ressource et garder une veille sanitaire.

Le fil rouge étant bien sûr l’influence du changement climatique avec déjà l’observation d’étiages de plus en plus précoce et de plus en plus sévères.

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